Odyssées vers le Sud

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Transatlas 2024

Voyage à vélo de Léon du 8 mai au 9 juin 2024

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samedi 15 juin 2024

M05 Transatlas 2024 : de la vallée Heureuse au retour en Belgique

Chers supporters, voici la suite et la fin du voyage à travers le Haut Atlas au Maroc.

 

Récit de trois journées dans la vallée Heureuse

Mardi 28 mai : à vélo dans une vallée jusqu'à une source importante

Dans le village de Ibakliouine situé à proximité de mon lieu d'hébergement (Tabant), une petite fille me conduit au lieu où l'on peut découvrir des traces de pattes de dinosaures incrustées dans la pierre ... depuis pas mal de temps ! J'imagine que cela ne fut possible qu'à un moment où le sol (la pierre) était en fusion.  Je ne sais pas, je ne suis pas géologue !  Vraisemblablement les pattes de ces animaux sentirent donc le rôti !  Sans doute ... sans témoins humains (heureusement pour eux) !

Un peu plus loin, une belle source jaillit de la montagne. Au grand bonheur des paysans qui peuvent arroser tour à tour leurs champs et leurs cultures. Au grand bonheur des ânes, chèvres et moutons qui peuvent y étancher leur soif.  Heureux eux aussi ... nous sommes en effet dans la vallée Heureuse (note je ne sais pas pourquoi mon smartphone met systématiquement une majuscule au mot "Heureuse"... heureusement il ne me met pas un autre mot non désiré comme cela arrive parfois ... comme la ville de Poitiers au lieu de potiers !)

Mercredi 29 mai : une vallée désertique

A pied cette fois à la recherche d'une autre source. Pour y arriver, des sentiers de chèvres avec un groupe de maisons berbères aux toits (plats) de terre compressée dont la plupart sont inoccupées. Une seule rencontre : un berger grognon ... je comprends qu'il soit ainsi, à force de vivre seul avec des chèvres ... rebelles de surcroît !  En redescendant, je vois des ouvriers travaillant à un aqueduc amenant l'eau à un terrain où ils ont planté des pommiers.  Ils proposent de m'embaucher... alors que le soleil tape déjà dur.  Non merci ("shoukran" ... orthographe incertaine), je me contenterai de suer sur mon vélo !

Jeudi 30 mai 2024 : visite du "Marabout Sidi Moussa" à Tabant

Situé tout en haut d'un promontoire, cet ancien grenier collectif retrace ce qu'est la vie berbère dans la région. De là-haut, l'on a une belle vision à 360 degrés de la vallée; ce bâtiment est construit en murs de pierres sèches. Dédié à un Marabout qui y serait enterré, des femmes viennent encore lui rendre dévotion.... ainsi que des touristes mais pas avec le même objectif !

Vendredi 31 mai : je quitte la famille Oulaidi ... vers l'Ouest

La veille du départ, séance photos avec les grands-parents, Mohamed et Fama Zaid, leur fils Mustapha, son épouse Kaltouma et leurs deux filles Malak et Maroua ... toute une famille qui m'a réservé un accueil très chaleureux durant quatre jours. Le vendredi 31 mai, départ de bon matin vers l'ouest et la ville de Demnate. Itinéraire très vallonné après une très longue descente.

les grands-parents, Mohamed et Fama Zaid

la veille du départ avec la famille Oulaidi et des proches

Mustapha et Kaltouma avec la petite Malak

Maroua la fille aînée de Mustapha et Kaltouma

Plus j'avance, plus il y a des champs de blé ou d'orge. Incroyable comment l'espace est occupé au maximum, parfois avec de toutes petites parcelles si peu accessibles ... par un tracteur mais bien avec un âne ... toujours "fidèle et courageux" ... mais qui reçoit parfois des injures mais pas - je l'espère - des "coups de pied au ventre" !  La terre est d'un rouge incroyable.  Je croise un nombre incessant de transporteurs (surtout des ânes) disparaissant sous leur chargement de fourrage ou de gerbes de blé ou d'orge.  Dans un village, un bruit persistant : une machine à battre actionnée par un tracteur.  La marque de la machine : Istanbul !  Pendant que les hommes s'affairent autour de la machine, je suis invité à prendre le thé ... avec de l'huile et du pain ... encore tout chaud, venant tout droit du four et du fond du coeur !

Une petite parcelle de céréales qui épouse le relief

Un peu plus loin un homme du haut de son champ déjà moissonné, m'invite à prendre le thé. Son épouse vient d'être mordue par un scorpion. Le remède: "du lait de vache" dit-il, faute de médicament et de dispensaire à proximité !  Je ne sais ce qu'il adviendra de cette femme ?

Un jour de repos à Demnate.

Ayant pu planter ma tente dans le jardin d'un gîte/hôtel, je dispose d'une journée pour visiter les environs.  Tout d'abord un pont naturel.  Impressionnant de descendre au fond de la vallée et de remonter au niveau de l'arche naturelle pour passer sous celle-ci.  Deux jeunes me montrent le chemin.  Leur français tout comme leur anglais est relativement réduit.  De la Belgique, ils connaissent Lukaku ... moi, je ne connais même pas le nom d'un joueur marocain !  A un certain moment, l'ouverture de ce "pont naturel" a la forme de l'Afrique.  Normal: le Maroc fait partie de ce continent.

Le second objectif de la journée, à savoir le village des potiers a failli ne pas avoir lieu.  Heureusement après avoir pédalé deux fois 5 km inutilement en direction du Nord, j'ai rencontré un jeune prénommé Youssef qui m'a guidé à travers les quartiers populaires périphériques de la ville de Demnate. Avec un vélo électrique mais sans batterie (bizarre mais il n'avait plus de chargeur !), il m'a mis sur la route du village recherché. Heureusement, j'ai pu voir (et filmer) deux potiers au travail. Le troisième m'a bien accueilli :  il a voulu que je mette mon vélo juste devant l'entrée de son atelier.  Sans doute craignait-il une bande de garnements du village.  Quand ceux-ci s'approchaient trop, notre potier se transformait en berger en faisant main basse sur un cailloux pour éloigner les gamins comme on éloigne un chien récalcitrant.  Mais voilà l'heure de la prière : notre Ali déploie un carton entre les pièces de poterie qu'il vient de tourner, pour se courber et s'agenouiller pendant que son épouse apporte thé, pain et huile d'olive.  Ce sera mon repas de midi ... un moment de partage alors que je ne saisis presque aucune de ses paroles en arabe ... et réciproquement.

Le potier au travail

A l'hôtel, il y a un groupe d'étudiant.e.s de l'université de Rabat venu.e.s pour un stage d'archéologie et d'ethnologie dans les environs.  Certain.e.s maîtrisent bien le français et/ou l'anglais.  La moitié des filles sont voilées.  Par contre hier soir, trois d'entre elles, cheveux au vent, se sont amusées durant une heure (au moins) à se prendre des selfies de chacune des trois dans toute une série de positions. Ah oui, j'oubliais de vous dire - mais je suppose que vous le savez - que dans ce pays comme dans la plupart des autres pays de de la planète, les smartphones (et plus seulement les GSM) sont presque aussi nombreux que les humains !  Même le berger du haut de sa montagne et la paysanne du haut de son âne est à même de communiquer par ce moyen devenu universel !  L'autre jour, une dame au bord de la route qui venait d'allaiter un enfant, a bien voulu que je les prennent en photo ... à condition que la photo n'atterrisse pas - et ce sont ses mots - "sur Instagram".  Cette dame perdue dans la montagne connaît donc ce mot ... moi qui ne connais à peine ce "réseau social" ... et dans lequel franchement, je ne vois pas ce qu'il y a de social là-dedans ! Mais bon les mots ont souvent plusieurs sens.

Vers le Sud et Ouarzazate : des cols en perspective

Un couple de touristes suisses ont installé leur motor-home dans la cour de l'hôtel où j'ai installé ma tente. Ils me font part du calcul suivant : étant donné qu'il me reste 150 km à parcourir de Demnate à Ouarzazate ... cela représente - selon le monsieur et son smartphone qu'il interroge  -  "4.000 mètres de dénivelé positif" dit-il. Fort bien et je traduis pour moi  : au moins autant de gouttes de sueur (et de courage) ... mais je n'ai pas - encore - fait le calcul ! Je verrai au bout du compte de l'effort fourni !

Trois cols de difficultés décroissantes

Pour le premier col ce fut une montée très longue de 28,4 km, au point que je pensais que je ne verrais jamais la fin avant la fin de la journée.  Au sommet (5 heures et 20 minutes de montée  en restant sur la selle à du 5,3 km/h), rencontre avec un anglais sur une moto BMW ... fabriquée en Inde: "très bonne mécanique" me dit-il.  Bravo pour les ouvriers et ingénieurs indiens  ... quant aux inconvénients pour les anglais de cette délocalisation ?  Et ce en plus du Brexit... !

Ce motard m'explique que la route depuis Ouarzazate est très mauvaise avec beaucoup de passages non goudronnés... en fait les ouvriers travaillent à l'amélioration de cette route qui relie Ouarzazate à Demnate soit 150 km). Une bonne première partie de plus de 30 km est terminée dans le Sud.  A certains endroits dans la montagne, du puissant matériel (Caterpillar, Volvo, etc.) creuse inlassablement la roche pour rectifier le profil de la route.  Les travaux sont colossaux et dureront des années.  Pour les touristes grincheux, il y a une alternative : la très belle route qui relie Marrakech à Ouarzazate en passant par le très beau col de Tizi-n-Tichka (2.260m selon la carte Michelin). C'est cet itinéraire qu'a suivi mon ami André Etchelecou des Pyrénées rencontré dans le désert d'Atacama au Chili en 2013 et chez lui en 2022 lors de la Transpyrénéenne.  André m'invite à l'accompagner en septembre prochain dans un raid à VTT très difficile (et sans doute qualifié d'extrême et un peu fou) de Lhassa au Tibet à Katmandu au Népal ... ce sera pour une autre vie !

Pour en revenir a l'Atlas, en ce qui me concerne, les très bons freins Magura dont est équipé mon vélo "Da Silva" me permettent de toujours freiner à temps (en descente surtout) quand un trou se présente ou lorsqu'un véhicule s'annonce.  En fait ce genre de route même si elle est partiellement en mauvais état, est plus intéressante car elle traverse des paysages insolites et surtout avec un nombre infime de véhicules à croiser.  La sécurité alliée à la beauté des paysages !

Pour les deux cols suivants, dépassant les 2.000 mètres comme le premier, la montée fut bien plus facile et moins longue que dans le sens Sud/Nord... ce que m'avait confirmé le motard anglais !  Au sommet du troisième et dernier col, un camion très lourd s'arrête.  Le chauffeur me demande si j'ai suffisamment de pain ... il est vrai qu'au Maroc le pain est présent à tous les repas (remplaçant les couverts pour, entre les doigts ... de la main droite (!) se servir de la nourriture ... ce à quoi je n'ai pas réussi à m'habituer) et pour les voyageurs, ils veillent à toujours avoir une réserve de pain surtout si le voyage est long ... et la traversée de l'Atlas (en l'occurrence ici le "Haut-Atlas", c'est un peu long ... surtout à vélo) !

Arrivée au sommet du dernier col de la Transatlas

Comme rencontres intéressantes outre des touristes français, belges et portugais ou des motards espagnols, anglais ou allemands, la rencontre la plus intéressante au petit matin, ce fut avec une gentille et paisible marmotte. Contrairement à celles que l'on rencontre parfois subrepticement en Vanoise ou dans le Queyras et qui se cachent aussitôt dans leur trou avant que vous n'ayez eu le temps d'ouvrir votre appareil photo, cette gentille marocaine (il est toujours question de la marmotte) à pris pleinement le temps de se laisser photographier .... sans mettre ses deux petites pattes devant elle pour cacher son beau petit visage et ses beaux yeux. A la grande joie du photographe ... comblé !  Avec elle pas de problème : elle ne demandera pas de ne pas figurer sur Instagram ou Facebook ou que sais-je encore !

Une dernière aventure nocturne : mercredi soir 5 juin 2024

Pour la dernière nuit passée avant l'arrivée à Ouarzazate, alors que je venais de traverser une plaine désertique surchauffée (certainement plus de 35 degrés comme en Ouzbékistan en 2013 ou au Zimbabwe en 2016) durant 35 kilomètres, je trouvai un petit bosquet pour passer une ultime nuit en "camping dit sauvage" à un endroit pas trop éloigné de la N10.  A peine endormi, je fus réveillé par la visite de trois hommes fouinant les lieux avec des torches électriques.  L'un d'eux se présenta comme "président" (je traduis par bourgmestre ou maire pour les ami.e.s d'Outre-Quiévrain) de la commune.  Ils me laissèrent en paix non sans m'avoir demandé si je ne craignais pas les scorpions ?  J'aurais dû leur dire qu'en Afrique, j'ai failli rencontrer lions et autres animaux "moins fréquentables" (comme des éléphants accompagnés de leurs petits) !  Rappelez-vous l'épisode du film 2015 où au Zimbabwe, je passe la nuit à côté de l'hôtel, dans ma tente entourée d'un grillage comme dans une cage de cirque.  Heureusement toutefois... du Maroc, je rentre sans morsure ni vilaine piqure.  Par contre un animal inoffensif a passé une nuit à quelques centimètres de la tente : au matin, j'ai découvert ... une tortue !

Un camping presque désert à Ouarzazate

Pour m'orienter à l'entrée de Ouarzazate à la recherche d'un camping, je m'adresse d'emblée à la bonne personne grâce à laquelle j'arrive aisément à un grand camping.  Grand... mais j'ai toute la place pour moi ... Je choisi un endroit ombragé pour les deux dernières nuits sous tente.  Des rencontres toutefois : avec un couple de Luxembourgeois (le monsieur a travaillé à Namur); un couple de Français dans un mobil-home tirant une remorque (contenant un quad avec lequel monsieur et madame vont "s'amuser" dans les dunes de sable).  Enfin deux couples de Portugais également en motor-home (autonomie complète assurée : cuisine, douche, WC, air-conditionné... dehors il y a 33 degrés !)  Le soir, ces retraités m'invitent pour le repas... arrosé de "vinho tinto" de leur pays bien sûr.  L'occasion pour moi pour me remettre au portugais mais avec une certaine difficulté pour échanger avec ces lusophones, moi qui ai pratiqué plutôt le portugais chantant du Brésil (1974-1977).

Samedi 8 mai 2024, arrivée vers 11h30 chez Ahmed (hôtel Tin Joseph) qui est tout heureux de me revoir et de constater que le compteur du vélo a bien augmenté de plus de 900 km et de 106 heures de roulage.  Il m'appelle "Doyen Léon" ; bien résolu à m'aider comme il le fit à l'aller lors de la - longue - attente du vélo bloqué à Casablanca durant trois jours, il emprunte à un de ses voisins une balance car je souhaite m'assurer que chacun des deux bagages ne dépasse pas 23 kg, limite imposée par les compagnies aériennes et au-delà de laquelle une taxe est perçue par kg excédentaire.  Après avoir démonté le vélo et "ficelé" le reste des bagages, la balance indique respectivement 23 et 22,8 kg !

Dimanche 9 juin 2024 : retour en Belgique

Levé à 5h pour prendre l'avion à Ouarzazate avec mon fidèle destrier (57.456 km au compteur depuis 2009 et 4.937 heures à me supporter sans broncher), retour sans encombre a Zaventem via Casablanca après avoir jeté de très haut un dernier regard sur l'Atlas déjà chauffé par le soleil.

Pour l'embarquement, le contrôle des bagages a été très sévère.  Le camping gaz que j'avais acheté à Ouarzazate a failli ne pas passer.  Finalement j'ai réussi à convaincre le contrôleur qu'il n'y avait plus de gaz ... car il n'y avait plus de bonbonne;  je l'avais vidé complètement au camping.  J'ai dû insister par deux fois pour qu'il me le laisse dans mon bagage (cela vaut quand même 25 euros !)  De plus il a fallu deux fois ouvrir chacun des sacs insérés dans le grand sac ... qui pesait exactement 23 kg sur la balance de l'aéroport !  Heureusement qu'il n'y avait pas de drone, il n'aurait pas pu s'envoler avec moi !

Casablanca : pour le retour, le vélo prend le même avion que moi jusque Zaventem !

A Zaventem,  bel et chaleureux accueil par Danielle, un bon petit souper avec de (vraies) frites belges avant de prendre connaissance des résultats des élections régionales, fédérales et européennes de ce 9 juin 2024.  Nous espérons tous que les derniers débats entre les ténors des partis se sont passés dans le respect de chacun.  Toutefois un vent du Nord venant du Grognon namurois m'a relayé aux oreilles des propos pas très jolis ... et pas seulement "grognons" !  Sans doute beaucoup d'incertitudes et de craintes en perspective pour la constitution prochaine d'un nouveau gouvernement !

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Bilan de la Transatlas 2024

Voici le décompte final:

- kilométrage: 916 km;

- nombre d'heures : 105 heures "de roulage";

- nombre de jours roulés: 18 jours complets;

- moyenne journalière: 50 km;

- moyenne horaire: 8,9 km/h;

- vitesse maximum (en descente de col : 67,33 km/h ... avec 35 kg de bagages dont 5 kg d'eau !);

- vitesse moyenne en côte: 4,5 km/h (sur la selle) ... encore moins quand il faut pousser le vélo ... et son équipement ... ;

- nombre de crevaisons et ennuis techniques: néant;

- nombre de nuits sous tente en camping "sauvage": 12;

- nombre de nuits sous tente en camping "sauvage": 12;

- ​animaux dangereux et autres bestioles rencontrés : néant;

- idem en camping "normal" (avec douche et toilette ... de temps en temps cela fait du bien): 7;

- idem en gîte (avec en plus un bon repas ... surtout des "tagines au poulet") : 9;

- "turista" : une nuit (médicament marocain très efficace);

- rencontres intéressantes : incalculable;

- aides reçues: eau (7 fois) thé (10 fois), orange/mandarines (2 fois), repas offert (3 fois), biscuits (1 fois) ;

- encouragements reçus: incalculable;

- cyclistes longue distance rencontrés : un marocain prénommé Mohamed (77 ans) avec des sacoches "Ortlieb" (90% des cyclo-randonneurs longue distance sont équipés de ce matériel allemand de qualité), zéro étrangers et deux jeunes marocains effectuant un circuit limité;

- pluie : un orage particulièrement fort avec une pluie très froide dans la descente d'un col le dimanche 19 mai (voir message précédent M04) ; a part cela, deux ou trois fois, quelques gouttes insuffisantes pour rafraichir l'atmosphère.

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Avant de terminer,  voici quelques pensées trouvées sur le mur du dernier camping à Ouarzazate, suivies de mes commentaires :

- "Voyager est un triple plaisir: l'attente, l'éblouissement et le souvenir."  Dans mon cas après 3 jours d'attente du vélo qui resta longtemps "non localisable" selon la personne contactée plus de dix fois (par mon ami Ahmed) à "Air Maroc" (Royal de surcroit), ce qui ne fut pas vraiment un "plaisir", arriva l'éblouissement lors de la découverte des vallées de la rose, du Dadès et surtout de la vallée Heureuse avec un "H" majuscule.  Ensuite les montagnes aux si belles couleurs du Haut Atlas ... avec les souvenirs en photos.

- "Voyager vous laisse d'abord sans voix, avant de vous transformer en conteur." ... J'espère que vous qui recevez ces messages, êtes toujours satisfait.e.s du "conteur" et pas seulement du "compteur" de km.

- "It's not just seeing beautiful places. It's about seeing the beauty in every place." Traduction (surtout pour Jacqueline P. qui me lit) : il ne s'agit pas seulement de voir de beaux endroits.  Il s'agit surtout de voir ce qui est beau en chaque endroit.  Et j'ajouterai "dans chaque personne humaine rencontrée".

J'espère avoir été pour vous un relais pour voir par les yeux et par les mots que j'ai utilisés les merveilleux endroits de cette région du Maroc ... à visiter de préférence à vélo ... non électrique, cela va de soi !  Quoique  des gens m'ont dit avoir vu deux étranges vélos surmontés d'un toit constitué de panneaux solaires utiles non pas seulement pour se protéger du soleil (comme déjà dit très généreux au Maroc) mais pour produire l'énergie qu'un cycliste ("normal" c'est â dire sans apport énergétique extérieur) produit par les mouvements de ses propres jambes !

Ceci dit, je vous souhaite bonne lecture de ma (longue) prose agrémentée d'une sélection de photos.

Léon Tillieux, le "transatlassien" comblé

M04 Transatlas 2024 : de la vallée des Roses à la vallée Heureuse

 

Chers amies et amis, merci pour vos messages et encouragements. Voici le compte-rendu de la suite du voyage en terre marocaine.

La route au jour le jour entre la vallée des roses et la vallée Heureuse

Première expérience de la piste marocaine

Le jeudi 16 mai, je quitte les amis de l'écolodge d'Almdoune vers la vallée du Dadès. Yassin m'a indiqué une piste raccourci vers cette vallée. A Bou Tharar, je suis rejoint par Antoine et Fanny rencontrés au lodge; avec eux je vais récupérer en voiture les objets cachés dans un tas de pierres, ce qui avait permis d'alléger un peu le poids des bagages à l'aller dans la vallée des roses. Merci à eux et me voilà en route par cette piste un peu difficile à cause des cailloux et des zones de sable. Merci au chauffeur qui m'a indiqué la bonne route à un endroit où j'allais me tromper...! Après avoir réussi à piloter ma monture sans trop de chutes, j'arrive dans la belle vallée luxuriante du Dadès. Le soir, n'ayant pas trouvé un endroit discret dans cette zone urbanisée pour planter ma tente, j'opte pour un camping attenant à un hôtel, avec une douche bienvenue.

Deux montées en épingle à cheveux

Après être passé par un très beau défilé entre les rochers, me voilà montant dans une série d'épingles à cheveux avec un nombre impressionnant de tournants. Vu d'en haut cela ressemble à certains cols en France. Montée toutefois facilitée par un bon revêtement. Au total cela vaut bien la montée de l'Alpe d'Huez... mais en ce qui me concerne pas avec un vélo de 7 kg comme les adeptes professionnels de la petite reine !

Arrivée au sommet d'un col de près de 3.000 mètres après plus de 20 km de travaux

Le samedi 18 mai me voilà embarqué dans un col en travaux "dont le sommet frise les 3000 mètres" m'avait prévu un restaurateur qui m'avait cuisiné des frites... hélas pas "belges" à mon goût !  Avant d'arriver aux travaux, un touriste allemand du haut de son 4x4 m'avait prévenu qu'il y aurait des engins de chantiers et des passages de cailloux et de sable. Il m'avait semblé être agacé par ces travaux sur une longueur de 20 km qui retardaient son planning et changeait quelque peu la couleur de son véhicule. Bien sûr j'ai dû puiser dans mes réserves pour, au bout de 4 heures d'effort, arriver au sommet et au macadam au moment où un couple franco-autrichien m'offrait de délicieux biscuits marocains.

Permettez-moi de vous exposer ici ma réflexion à propos de ces travaux et d'autres qui en Belgique ont déjà fait couler beaucoup d'encre. Ce col marocain n'était pas répertorié comme col routier sur la carte Michelin car considéré comme une piste vivement déconseillée en hiver (et oui tout le monde ne le sait pas mais il neige aussi au Maroc en hiver). Ces travaux vont permettre aux usagers nationaux et étrangers d'accéder à ce col plus facilement en toute saison. De la même manière que lorsque les travaux au carrefour Léonard à Bruxelles seront terminés (ce qui présuppose qu'ils ne soient pas sans cesse postposés satisfaisant ainsi les égos de certains politiciens et permettant aux média de remplir leurs pages et éditoriaux alors que l'actualité nationale et internationale ne manquent pas de sujets), les usagers - belges et étrangers - seront tous heureux de retrouver un itinéraire sécurisé. Mais entre nous ... une fois que les travaux (autour du fameux Léonard) seront terminés et que chacun pourra de nouveau se lever une heure plus tard, reprendre la voiture après avoir essayé le train (moyen de transport pourtant bien plus éco-responsable) combien prendront la peine de remercier ingénieurs, maîtres de travaux et ouvriers qui sur ces autoroutes risquent leur vie pour offrir aux usagers de bonnes conditions de circulation. Ici au Maroc, les ouvriers rencontrés sur ces chantiers poussiéreux et surchauffés par un soleil parfois trop généreux, ont toujours pris la peine de m'encourager et certains m'ont offert le thé sur le lieu même de leur travail... avec un sourire si éloigné des esprits chagrins et chagrigneurs entendus ces derniers temps. Qu'ils en soient remerciés ...

Vous avez dit chaleur ?

Dimanche 19 mai alors que je m'apprêtais à descendre durant 25 km, je m'étonnais que les ingénieurs marocains installent des canaux d'évacuation d'eau le long des routes de montagne, croyant que la pluie est rare dans ce pays, j'ai dû réviser mon jugement lorsque j'ai dû essuyer un gros orage. Pluie dure et très froide du style "flèche wallonne 2024". Heureusement j'avais vêtements adaptés, gants et cagoule pour affronter ces intempéries. De plus, frigorifié, je me réfugiai dans un hangar ouvert occupé par quelques ballots de foin et des hirondelles qui y ont élu domicile. Dans la vallée un peu plus loin, une famille m'offrait le thé pour me réchauffer. Ce soir-là ayant planté ma tente à l'écart de la route, bien vite un troupeau de chèvres fit son apparition. Ensuite bien sûr le petit berger qui me montra comment utiliser une sorte de fronde pour ramener les chèvres récalcitrantes au troupeau. Avec un coup sec qui détonne comme un coup de fusil !

Deux nuits bien différentes

La première, la tente dressée sur un chemin menant à une habitation en construction avec le seul passage d'une écolière rentrant de l'école. Une nuit qui s'annonçait paisible et réparatrice. Et bien que non ... c'était sans compter sur les innombrables chiens qui peuplent les villages environnants et qui se sont mis à aboyer une bonne partie - pour ne pas dire la totalité - de la nuit. Mais ils n'étaient pas les seuls. Des ânes - au nombre inconnu - se joignaient aux premiers pour agrémenter la nuit de leur cri caractéristique : en ce faisant, ces animaux par ailleurs si courageux et utiles pour un tas de transports, allaient chercher bien loin l'air nécessaire à ce bruit sourd et saccadé audible à des kilomètres à  la ronde "à fé tronner leu vinte à tôt sketter" dirait en wallon notre ami Bernard Van Vynckt, "li flamin curé" de Marche-en-Famenne, digne successeur de Paul Malherbe "po les messes è wallon do londi dès fièsses di Wallonye à Nameur". Veuillez excuser mon piètre wallon surtout du point de vue orthographique. Je demanderai à mon ami Joseph Dewez (président des Relis Namurois) de réviser ma prose.

La seconde nuit le mardi 21 mai. Ayant voulu absolument arriver en haut d'un col avant la fin de la journée, je suis arrivé trop tard pour avoir le temps de trouver un endroit adéquat (calme, discret et plat pour monter la tente) si bien que j'ai dû me résoudre à demander à une famille la permission de bivouaquer derrière chez eux. Difficile: dans la famille approchée, la fille était opposée résolument alors que la maman hésitait. Je comprenais tout de leur désaccord même si je ne parle pas arabe. Finalement c'est le coeur de la seconde qui a gagné. Je montais la tente sous un arbre à l'arrière de la maison alors que "la dame rentrait ses blancs moutons même s'il n'y avait pas d'orage à l'horizon". Le chien de la famille quant à lui, était du même avis que la fille: il aboya toute une longue partie de la nuit... pour finalement au petit matin venir s'étendre non loin de moi en se taisant, ayant fini par comprendre que je n'étais plus un étranger. Dès que je montrai le nez en dehors de la tente, la maman m'apporta un plateau avec pain et lait ... de ses moutons qu'elle ne tarda pas à conduire vers les pâturages - visuellement pas aussi verts que dans les Pyrénées...! Puisse ce modeste témoignage d'accueil dans un village perdu de l'Atlas marocain inspirer positivement les Européens (dirigeants, futurs élu.e.s ... et - nous - électeurs) en ce qui concerne la problématique (certes complexe) de l'arrivée des migrants (certes nombreux) aux portes de la Méditerranée.

Une cathédrale au Maroc !

J'ignorais que le Maroc compte dans ses lieux à visiter un de ces joyaux de l'art roman ou gothique tels que Chartres, Amiens ou Reims. Mais il s'agit de tout autre chose: plus imposant et vieux de millions d'années. Un énorme rocher que j'ai eu le loisir de contempler bien avant d'arriver au pied de ce "monument" et encore de nombreuses heures en le quittant. Je passai deux nuits dans un camping afin d'avoir le loisir de randonner autour de cette « cathédrale ». Un grand merci à un berger de m'avoir remis sur le bon chemin. Au point culminant de ce tour qui dura finalement cinq heures, je tentai un chemin d'escalade mais très vite, en voyant que cela était réservé à des personnes expérimentées, je renonçai ... désireux de vous revoir à l'issue de cette Transatlas...

Une cathédrale en pierre au Maroc !

Un long "au revoir" à la cathédrale. J'ignorais en prenant le chemin vers la vallée heureuse, que ce "monument" allait rester visible (dans mon dos) durant des heures. En effet la route était non seulement dépourvue de macadam mais ne cessait de s'élever. Cela dura 11km  interminables. Péniblement, je poussais ma monture ... et son chargement !  Les pneus sautaient sur les cailloux trop souvent mal placés.  Mon pied glissait sur des graviers roulant comme des billes d'écolier. De temps en temps, un juron sortait de ma bouche fatiguée... dans la langue de Vondel, car il me semble que cela sonne mieux. Peu de rencontres : un Français perdu dès le départ faute de signalisation, un duo de rallymen Français dans une ancêtre Renault 25 ... soulevant inutilement de la poussière mais dont le chauffeur me rassura en m'informant qu'il n'y avait "plus que" 20 km dont la moitié de descente avant de retrouver le macadam, et une petite dizaine de camionnettes chargées d'une tonne de matériel et "par dessous tout" comme le chantait Bécaud, entre 15 et 20 passagers ... forcés - faute de place - de rester debout et de s'agripper les uns aux autres dans les tournants.

Après une nuit passée dans la tente installée sous un énorme rocher synclinal, avant d'atteindre la vallée Heureuse, laissez-moi vous dire - mais je crois que je finirai par vous lasser - que je me suis encore payé deux cols: un de 15 km (près de 4h sur la selle pour l'ascension) le dimanche 26 mai au nom très marocain de Tizi-Tbilissi et un de 8 km le lundi 27.  Je vous épargnerai les chiffres mais vous dirai que j'ai fait une très belle rencontre d'un berger aux 100 chèvres occupant toute la largeur de la route.

J'espère que cela vous a plu de me suivre dans cette folle, dure mais combien enrichissante (au point de vue rencontres) épopée "transatlassienne"

Dans le prochain message je vous décrirai mes découvertes et rencontres ici dans la vallée Heureuse. Je suis arrivé hier lundi 27 mai en début d'après-midi, au gîte "des roses", accueilli par Mustapha, le souriant frère d'Oumar et de Yassin (voir message M03 – « Zen écolodge » d'Almdoune), son épouse, ses parents ... bien connus de mon amie Michèle Hicorne. Compte-rendu de leur accueil dans le prochain message.

En ce qui concerne l’accueil, j’ai passé une nuit chez un jeune prénommé Aïmad qui m'a accueilli dans sa minuscule maison de 10 mètres carrés. Une nuit dont je me souviendrai car "agrémentée" par une courte mais vite maîtrisée "turista".  Merci au médicament marocain acheté préventivement à Ouarzazate

Léon Tillieux le « bienheureux » cyclo-randonneur arrivé dans la vallée Heureuse au Maroc. 

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Annexes : de beaux visages berbères ... respirant et inspirant la bonté !
 
 
Un dromadaire guidé par un adolescent
 
Ce berger aux cent chèvres m'a montré fièrement son gsm !
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

M03 Transatlas 2024 : de Ouarzazate à la vallée des Roses

Merci pour les nombreux messages reçus et vos encouragements.

1- Dimanche 12 mai 2024 - Au revoir Ouarzazate

Aidé d'Ahmad, je remonte le vélo qui n'a reçu aucun dommage durant les vols. Vers 12h30, j'enfourche ma monture retrouvée. A côté du drapeau tricolore belge, Ahmad a attaché un drapeau marocain.

Quelques personnes me saluent. Certains klaxonnent. Je sors de la ville. La route est revêtue d'un asphalte impeccable ... "meilleur qu'en Allemagne" m'ont dit des motards allemands !  Vous en conclurez qu'il faudrait embaucher des sociétés marocaines pour réparer nos routes en Belgique ??

La plupart des taxis et de nombreuses voitures sont des "Dacia". J'ai expliqué à Ahmad l'origine roumaine de la Dacia, ancêtre de la Renault 12 des années 1970. Ces voitures montées actuellement au Maroc n'ont rien à  voir avec les Dacia roumaines de l'époque Ceausescu ni avec l'est-allemande Traban repérable au moteur et son bruit d'essoreuse.

Première halte à 17 h le dimanche 12 mai dans la ville de Skoura, une palmeraie de 25 km2. Un repas "tagines poulet" avant de poursuivre ma route à la recherche d'un endroit pour bivouaquer, ce qui est possible au vu de la température élevée qui règne dans cette région.

2- Première nuit sous tente

Pour la première nuit sous tente, je choisi un coin discret en hauteur non visible de la route. Pour monter la tente, je dois affronter un vent  terrible. Je leste la tente avec de grosses pierres ... ce n'est pas cela qui manque ici. Le début de la nuit est chaud mais cela va se rafraîchir au p'tit matin.

3-  Lundi 13 et mardi 14 mai 2024 - En route vers la vallée des roses

Une très ancienne Kasbah

Levé à 5h30, j'enfourche le vélo à 7h30 après  avoir assisté au lever du soleil. Un premier col de 1.370 mètres grimpé sans la moindre difficulté ... car je suis sur de l'asphalte (marocain !). A 14h, j'arrive à El Kalaa N'Gouma. Vue splendide sur la ville. Je demande mon chemin pour ne pas louper la vallée des roses. Des enfants vendent de l'artisanat confectionné avec des roses. Des dames récoltent les fleurs pour faire du parfum. Un médecin s'arrête... Il m'invite chez lui : il reçoit des stagiaires médecins de l'université de Liège.

Ces dames récoltent les roses en vue de faire du parfum

Oui, je suis bien dans la vallée des Roses

La montée est assez raide ... le "Da Silva" est toujours trop chargé (mon péché mignon) !  Vers 18h, j'opte pour un coin tranquille dans la vallée des roses. Pas de perturbation durant la nuit et au p'tit matin, je démarre à 7h pour bénéficier des heures supportables avant que le soleil ne tape trop fort. J'ai préalablement réduit le poids des bagages en cachant une partie des vêtements prévus pour la haute montagne dans un tas de pierres. Je récupérerai cela au retour ... gants, cagoule, poêle pour cuisiner ... pas absolument nécessaire ou utile pour l'instant !

4- Deux nuits dans un "écolodge" très sympa !

Avant d'arriver à Alemdoune chez les amis de mon amie Michèle Hicorne ("la féminine" des 4 membres de l'équipe "Pas-lestine" de l'Oxfam Trail Walker 2013-2014 avec André Verlaine, moi-même et notre regretté Marcel Haulot trop tôt décédé en 2021),  j'arrive à l'écolodge situé à deux pas de la vallée d'Agouti.  Dans le village, on m'a déjà offert "le" thé marocain deux fois : l'instituteur à qui je demandais la route et les hommes présents dans une tente venant d'être montée en vue des funérailles d'un jeune habitant originaire du village décédé dans le nord du pays.

Yassin, qui m'accueille m'offre une chambre pour deux nuits ... au lieu du jardin où je pensais monter la tente. Une bonne douche suivi du "thé" bien sûr (pas sur mais bien sucré) et le repas : une délicieuse pizza berbère ... rien à voir avec notre insignifiante "fast food" américanisée (avant que celle-ci ne soit chinisée  !)

L'après-midi, après une courte mais récupérante sieste, je me rends dans les gorges d'Agouti aux couleurs merveilleusement éclairées par un soleil déjà moins fort. Peu de personnes rencontrées : un berger dont les chèvres broutent les arbustes dont certains ornés des fameuses roses qui ont donné le nom à la région. Quelques Vttistes s'évertuent à passer par des endroits plus tôt adaptés à de la randonnée. Mais bon tant que ce n'est pas des motards ou des quads...!

5- Mercredi 15 mai 2024 - visite commentée du village

Après le délicieux repas du mardi soir - cuisine berbère - composé d'une succulente tajine poulet citron, la musique berbère réunit un groupe de randonneurs français (composée d'un homme et d'une dizaine de femmes), un jeune couple français, Antoine et Fanny, habitant Arith, un petit village savoyard à 30 km d'Annecy, en recherche de culture et mode de vie berbère, nous passons une nuit calme dans ces montagnes marocaines.

Ce mercredi matin, avec Yassin comme guide nous faisons connaissance avec le village. Sur le plan de l'agriculture avec des parcelles et un système d'irrigation permettant un accès équitable aux différentes familles du village. L'eau devient de plus en plus rare suite au changement climatique et la raréfaction des pluies (rarement seulement durant quelques minutes). Les montagnes ainsi privées de cet or bleu ne parviennent plus à alimenter les nappes phréatiques. Le chef du village veille et intervient en cas de conflit.

Nous traversons différents villages avec écoles maternelles, primaires et même un lycée régional. L'enseignement est entièrement gratuit.

La Kasbah est toujours construite au point le plus élevé du village

Après la visite d'une très ancienne kasbah, Yassin nous détaille l'historique de ce lieu central du village avec les différentes fonctions de cette "forteresse" habitée jusqu'à la fin du 18ème siècle. Dans l'antique cuisine au plafond encore noirci par les fumées, des chèvres ont élu domicile ! A côté de cette imposante construction, il y avait un grenier communautaire - véritable banque - où les habitants du village disposaient d'un local sécurisé où chaque famille entreposait réserves de nourriture, valeurs monétaires, etc.

Après un repos mérité l'après-midi, un délicieux couscous nous attend. Saveurs qui réjouissent nos papilles avant de quitter ces si gentilles personnes qui nous ont accueillis.

6. Retour vers la vallée du Dadès

Après deux nuits et près de deux jours de repos mais aussi de rencontres, je repars vers le Sud par la même route, sinueuse et escarpées qu'à l'aller. Je quitte Yassin et ses amis. Je retrouverai sa famille dans la vallée  heureuse.

Mais avant de remonter sur mon vélo qui a bénéficié  d'une journée de repos, Yassin me renseigne un raccourci partant du village de Bou Thara vers Ait-Youl dans la vallée du Dadès (pour celles et ceux qui veulent me suivre sur Google Maps). Antoine et Fanny sont passés par cette vallée et m'ont renseigné un itinéraire très intéressant vers la Vallée Heureuse en passant par la ville d'Imitchil et la fameuse « cathédrale » (un énorme rocher visible de loin). Routes un peu cabossées, voir des pistes mais assurant des paysages splendides.

Compte tenu de cela, le prochain message vous sera vraisemblablement envoyé dans un nombre de jours encore inconnu à ce moment car dépendant des aléas de la route, de la chaleur, de l'accès à l'eau, etc.

Ceci dit ... à la prochaine.

Signé Léon, le transatlassien, pas encore trop fatigué ...!

Mes excuses pour les fautes et les accents erronés... c'est la faute - pas à Voltaire - mais à mon Smartphone qui par ailleurs me permet de communiquer par WhatsApp 

Nous vous offrons notre sourire

Je vous regarde d'un oeil !

Bien sûr que vous pouvez voir nos sourires et nos (beaux) yeux !

 

 

 

M02 Transatlas 2024 : de la gare de Jambes à Ouarzazate au Maroc

Chers amies et amis de la Transatlas, voici les premières nouvelles de ce nouveau voyage.

8 mai 2024 - De la gare de Jambes à  Zaventem

Une première pour moi : suivant le conseil de notre voisin Gilbert, je me rends à Zaventem par le train direct.  Gentiment aidé par Danielle et ma fille Iraci, je prends place dans le wagon-vélos avec la caisse contenant le « Da Silva » et le bagage tous deux limités à 23 k.

A l'enregistrement du vélo, celui-ci pèse 24,8 kg. Deux employés d'Air Maroc discutent entre eux ... et ne me réclament pas de supplément.  Mon voyage au pays des "gens gentils" commence bien !

Mais ... attendons !

Un premier vol m'emmène à Casablanca. Une escale de deux heures et avec le second vol, je débarque à Ouarzazate en pleine nuit. Un taxi m'attend pour m'emmener chez "Tini Joseph" à deux pas de l'aéroport.

Pas de vélo!

Pour la première fois en 15 ans de voyages vers les Amériques, l'Asie et l'Afrique, le vélo bien emballé dans sa caisse en carton, n'est pas là à l'arrivée. Déclaration faite à deux heures de la nuit auprès d'une employée un peu endormie, en lutte avec une imprimante récalcitrante, je repars avec mon gentil taximan qui m'a patiemment attendu.

Une première journée d'attente

Bien accueilli par le gérant de l'hôtel "Tini Joseph" qui se prénomme Ahmad, je me réveille en pensant d'abord à mon compagnon - fidèle monture - qui ne m'a jamais fait faux bon !  Bien aidé par Ahmad très empathique, nous partons a la recherche de bonbonnes de gaz, absolument indispensables à un randonneur mais interdites dans les soutes à bagages tout comme les pneumatiques gonflés.  Au retour, Ahmad propose lui-même de téléphoner deux et même trois fois au numéro que l'on m'a donné pour aller à la chasse aux renseignements. Sans succès, l'on me répond qu'il n'y a pas de traces de mon vélo à Casablanca. La personne met même en doute qu'il ait été vraiment embarqué à Zaventem !!! Impossible : j'y étais trois heures avant le décollage et je l'ai vu partir avec les bagages "hors dimension" pour ne pas parler franglais.

Jeudi 9 mai 2024 - 23h

Pour me remettre de ces incertitudes et émotions, après un bon souper marocain, je me couche en me disant que la nuit porte conseil. Demain sera un autre jour. Dans la nuit, je rêve que le vélo réapparaît ...!  Mais bon !

Une seconde, une troisième... journée d'attente !

Par courriel je contacte l'agence Connections de Namur où j'ai acheté le billet à la compagnie Royal Air Maroc.  Les dames très empathiques elles aussi, me répondront par courriel à deux, trois, quatre ... reprises : rien de positif. Rien de "Royal" dans tout cela !

Samedi 11 mai 2024 - 18h10, nouvel appel téléphonique avec une réponse énigmatique: le bagage a été localisé... sans préciser où  !  Une heure plus tard ... la personne répondant nous informe que le vélo se trouve à Casablanca ... ou à Ouarzazate ... ici je doute mais heureusement il n'est pas à Tombouctou ou à Bamako !

Dimanche 12 mai 2024 - 7h30 du matin : Ahmad me propose de nous rendre en voiture à l'aéroport pour poursuivre notre recherche.

Youppie le vélo est arrivé!

Il était déjà là hier samedi matin ... mais il fallait bien 24h pour que la communication passe... nous sommes quand même à 500 mètres de l'aéroport...! Fou de joie, nous revenons chez Ahmad avec la caisse rapidement ouverte. En moins de deux, les bagages sont répartis de part et d'autre du vélo.  Et vers 11 heures, ce dimanche matin, me voilà parti sur ma monture retrouvée vers l'est en tournant le dos à Ouarzazate (le Hollywood marocain de plusieurs réalisateurs, dont je n'ai vu aucune trace) avec l'impression d'y avoir tourné un mauvais film ... qui sera vite oublié.

Car me voilà en route vers la vallée des Roses, où je suis attendu dans un lodge écologique. La suite dans le prochain message.

Notes complémentaires

"Tin Joseph" tel est le nom de l'hôtel ou je suis resté plusieurs nuits en attendant le vélo. Ahmad le gérant qui m'a bien aidé m'a expliqué le sens du mot Ouarzazate. "Ouar" est un mot berbère signifiant "sans" et "Zazate" un mot arabe signifiant "bruit." Ouarzazate serait donc une ville sans bruit ... ce que j'apprécie et surtout apprécierai particulièrement dans mon périple, surtout les nuits suivant un long trajet à vélo !  Ahmad a ouvert cet hôtel en 2019 et l'a appelé Joseph en souvenir de son père qui portait le prénom d'un personnage important de la bible - un fils de Jacob (Youssef en arabe) lui-même petit-fils d'Abraham - vénéré par les trois religions monothéistes: Judaïsme, Christianisme et Islam.

Les Berbères, selon Ahmad sont présents au Maroc depuis des temps immémoriaux, bien avant les Arabes et selon lui - fier d'être Berbère - la majorité des Marocains "portent l'ADN  de cette origine berbère... et non pas arabe même s'ils ont dû assimiler cette langue … et leu religion, l’Islam."  Quant à son père, il parlait correctement le français à l'époque où le Maroc était un protectorat français (1912-1956).  C'est la raison pour laquelle il utilise le terme français pour le nom de l'hôtel, alors qu'il se prénommait "Youssef".

Ouarzazate, ville de garnisons.  Dans chaque quartier, à chaque sortie de la ville, une caserne repérable par les hommes kaki à l'entrée, par le clairon et le tambour qui roule le matin vers 8h. (! No camera, no photos). Bien, mais cela doit représenter un bon pourcentage du budget de l'état marocain !  D'aucuns diraient que cela crée beaucoup d'emplois ! Mais j'ai vu aussi pas mal d'écoles et de centres de formation. Ahmad a un ordinateur Lenovo, la même marque que le mien... "fabriqué au Maroc" dit-il fièrement, lui qui a travaillé dans plusieurs pays de l'Afrique de l'Ouest (Burkina Faso, Mali, etc.), pays qui de plus en plus "lorgnent" vers Moscou pour un avenir incertain pour eux ... comme pour nous !

Atlassement vôtre , Léon Tillieux

 

 

jeudi 18 avril 2024

M01 Transatlas 2024 : en route vers la vallée heureuse dans le Haut Atlas Marocain

 

Nouveau voyage à vélo en vue en ce printemps 2024 :

du mercredi 8 mai au dimanche 9 juin 2024 dans le Haut-Atlas marocain

Après un hiver durant lesquels mes jambes se sont quelque peu endormies, me voilà "tout heureux" de me préparer à un nouvelle traversée en montagne : le Haut-Atlas au Maroc.

Le périple : au départ de Ouarzazate, une boucle en passant par la vallée des Roses, la vallée et les gorges du Dadès pour rejoindre la vallée heureuse et retour à Ouarzazate.

Aït Bougmez, la vallée heureuse … vallée secrète

A l’ombre du M’Goun, une haute montagne du Maroc, le seigneur des lieux, l’eau a créé un immense jardin où les nuances de vert des cultures en terrasses se mêlent à la terre rouge et au bleu éclatant du ciel. Au cœur du Haut-Atlas central, se nichent les Aït Bougmez, la “vallée heureuse” dont les Berbères sont les gardiens…

Enclave du Haut-Atlas isolée il y a peu encore, une piste goudronnée permet aujourd’hui de pénétrer dans la vallée s’étirant en un long ruban vert de 35 kilomètres irrigué par les seguias, ces canaux qui répandent l’eau de la rivière pour créer des terrasses en damier, véritable mosaïque aux couleurs éclatantes. Quelque 25 villages d’agriculteurs berbères ponctuent le paysage, réunis autour des greniers fortifiés ou des tighremts (anciennes maison fortes). Des villages de terre ocre étagés sur les versants de la montagne, dominant les champs de blé, d'orge et de maïs. Agriculture, élevage et artisanat rythment la vie des villageois. Dans cette vallée d’altitude, le temps s’écoule lentement.

Un autre temps… toutefois perturbé par l’invasion des smartphones et autres technologies de « notre temps »

Au rythme des saisons et des récoltes, la vie des Berbères s’écoule, immuable. A l’automne, avec leurs araires en bois, les hommes labourent les champs. En hiver, les femmes tissent des couvertures en laine, vont chercher l’eau au puits. Au printemps, les hommes creusent et entretiennent les précieux canaux d’irrigation. Qui l’été feront fleurir arbres fruitiers, champs d’orge et de blé : vient alors le temps des moissons pour toute la famille.

C’est la civilisation de l’essentiel, de l’indispensable, de l’économie. Ici, l’individualisme, le superflu, sont inconnus. Sobriété des maisons, humilité des hommes dans leurs gestes, leurs conversations toujours brèves et efficaces. On ne répète pas un message, on ne parle jamais pour parler. Hospitalité, sourires chez les enfants surpris dans leurs jeux, chez les femmes qui reviennent des champs ou du puits, chez les hommes qui préparent le thé pour leurs hôtes. La “vallée heureuse”, un nom qui raisonne comme une invitation au voyage.

Visages berbères

En langue berbère, ce sont les Imazighen, des “hommes libres” qui vivent en harmonie avec la nature. Perse, mède, cananéenne, indienne…, leur origine se perd dans les méandres de l’Histoire et la mémoire des mythes. Une structure de société millénaire : familles, villages, clans, tribus et confédérations. Une culture ancestrale : un attachement profond à la terre, l’importance de la communauté, le sens du sacré, l’hospitalité. Le peuple berbère perpétue un patrimoine indissociable de l’identité du Maroc.

A suivre au fil des billets que vous recevrez par courriel au fur et à mesure de l’avancement de ce nouveau voyage.

Léon Tillieux